Lire l’histoire de François Fernandez

Lire l’histoire de François Fernandez

Un engagement de jeunesse, François prend le Maquis cévenol

A Mazac, près d’Alès dans le Gard, François Fernandez et ses amis se réunissaient fréquemment autour de l’instituteur René Pagès – militant de la gauche socialiste. Ce dernier fut scandalisé par le vote de certains députés socialistes à Bordeaux, où s’était réfugié le gouvernement fuyant l’avancée des troupes allemandes. En ce 10 juillet 1940, ce vote avait donné les pleins pouvoirs au général Pétain. François avait 16 ans. L’instituteur et d’autres amis alésiens s’organisèrent pour rejoindre les réseaux Combat et rapidement militèrent pour que la jeunesse du coin rejoigne le « maquis ».

Après en avoir discuté, François et trois de ses camarades voulurent partir rejoindre le combat clandestin.

La petite histoire pour éclairer la Grande Histoire 

Dans la famille Fernandez, les fils discutaient entre eux. François et Nicolas souhaitaient rejoindre la Résistance. Toutefois, il y avait un problème de taille : la survie économique de la famille. Il y avait trois salaires de mineurs qui rentraient tous les mois (ceux du père et des deux aînés – les jumeaux François et Joseph). Le troisième, Nicolas, avait commencé des études en fac.

Il convenait de savoir si avec les seuls salaires du père et de Joseph ils pourraient toujours payer les études de Nicolas. Nicolas calcula et conclut que c’était possible, à la condition que lui-même trouve un petit travail à Montpellier. Par ailleurs, lui-même souhaitait rendre des services à la Résistance, notamment lorsqu’il rentrait à Alès en revenant de Montpellier. C’est ainsi qu’il servit de « facteur » à la Résistance.

Ainsi rassuré, François put rejoindre le « maquis ». Il partit un matin, après avoir fait semblant d’aller à la mine. Ce jour-là, il n’eut pas le courage de le dire à sa mère, confiant cette tâche à son frère jumeau et à son père.

Le maquis

Le maquis avait pris ses quartiers en Cévennes et notamment dans la Vallée Française.

François devint « Toni » de son nom de Maquisard. Les Maquisards avaient comme activités principales de s’entraîner en vue des combats à venir et parfois d’aller dans la plaine stopper un train ou plastiquer un pont. Les trains visés étaient notamment ceux qui transportaient le charbon alésien vers l’Allemagne.

Les responsables de Combat prirent contact avec les autres mouvements, acceptant rapidement l’autorité de Charles de Gaulle et de Jean Moulin, à tel point qu’ils fusionnèrent rapidement avec les Gaullistes.

François comme l’on s’en souviendra

« Ceux de Bir Hakheim » 

Un groupe de Maquisards se faisait appeler « Ceux de Bir Hakheim », en souvenir d’une glorieuse victoire de l’armée française libre en Lybie. Ce groupe cultivait son indépendance d’action. L’armée allemande s’étant aventurée en Cévennes, ils refusèrent d’obéir aux consignes de la direction de la Résistance qui demandait aux Maquisards de ne pas bouger pour ne pas mettre en danger la population.

Ils attaquèrent ce détachement allemand puis se réfugièrent dans le hameau de La Parade, sur le Causse Méjean. L’armée allemande envahit le village et enferma la population dans l’Eglise, avec l’intention d’y mettre le feu (comme à Oradour-sur-Glane). Il semble qu’un habitant informa les Allemands de l’endroit exact où se cachait le groupe Bir Hakeim. Ils se battirent vaillamment mais furent tous exterminés. La population du village, avec des aides de la Résistance, éleva un monument aux morts à leur gloire à l’entrée du village.  

C’est sur ce même Causse Méjean qu’un terrain d’atterrissage fut sommairement construit par tous les réseaux en vue de pouvoir fournir des armes pendant la nuit aux avions français et alliés.

Combat de la Libération à St Just-et-Vacquières 

Les autres réseaux de Résistance, qui s’étaient cachés, participèrent très vite aux combats ultimes. Ils eurent comme mission de prendre à revers les troupes allemandes qui combattaient contre l’armée française qui avait débarqué sur les plages du Midi. A cette occasion, François vit la mort de près. Il servait avec un compagnon un fusil mitrailleur. La mitraille les assourdissait, quand brusquement François s’aperçut qu’il n’entendait plus le son de son arme. Il se tourna vers son compagnon qui était allongé dans l’herbe avec un trou au front d’où s’écoulait un filet de sang.

Engagement à Nîmes dans l’armée de de Lattre de Tassigny 

Les Maquisards firent quelques prisonniers, l’essentiel de la troupe allemande ayant réussi à fuir vers le Nord. Ils les convoyèrent jusqu’à Nîmes auprès de l’armée française libre de de Lattre de Tassigny, après avoir laissé quelques-uns des leurs pour garder les cadavres de leurs compagnons morts et les remettre à leurs familles. A Nîmes, ils apprirent que ces soldats allemands étaient surtout des « Malgré nous », des gens de pays de l’Est de langue allemande (comme les jeunes Alsaciens qui furent envoyés combattre contre les Russes).

A Nîmes, François et ses amis de Mazac s’engagèrent dans l’armée française et continuèrent le combat. Le Maquisard Toni devint le soldat Fernandez.  

Les combats dans les Vosges

Des combats violents eurent lieu dans les Vosges où les Allemands tentèrent de résister. 

François, en bon paysan, fut frappé par la richesse de la terre alsacienne et sympathisa avec une famille de paysans. Il disait souvent : « Les Alsaciens sont curieux : ils parlent allemand mais se veulent Français.» Lors de la traversée du Rhin en 1945, François fit une nouvelle rencontre avec la mort. Depuis son bateau, sous la mitraille allemande, il vit une bombe tomber sur le bateau voisin et un soldat se noyer et se souvint qu’il ne savait pas nager. Les quelques heures de traversée furent très longues.

L’Occupation de l’Allemagne et la Libération

Il en parlait très peu. Les camarades de François étaient occupés à gérer la zone française d’Occupation et n’eurent que peu de contacts avec la population allemande.

Quand la fin de la guerre arriva, l’armée fit choisir ses combattants : soit le retour au pays où l’on manquait de bras (notamment dans les mines), soit l’engagement pour aller combattre en Indochine. Pour François et ses trois amis le choix fut rapide : le retour au pays s’imposait, car certes il y avait la mine, mais à la sortie il y avait le soleil du Sud.

Le retour en train avec son ami Charrière se fit en passant par Paris. Charrière y ayant des parents, ils s’arrêtèrent un jour ou deux. Ils furent étonnés par les Parisiens qui dans la rue portaient volontiers le costume, parfois la cravate, mais vivaient dans un dénuement domestique extrême. Les parents de Charrière avaient vendu leurs meubles pour se nourrir et s’asseyaient sur des caisses. Ils constatèrent que les Français de la campagne avaient vécu – sous l’Occupation – bien mieux que les Français des villes.

Le mariage de François
et Jeannette

En arrivant à Mazac, après la capitulation de l’Allemagne en 1945, François a rejoint sa famille avec son uniforme de soldat qui faisait l’admiration de son petit frère Pierrot, qui était né en son absence.

Pendant son engagement, Jeannette, sa voisine qui habitait en face de chez ses parents, était devenue sa marraine de guerre. Cette démarche était une volonté de la Résistance pour permettre de consolider les liens avec la population française. François connaissait Jeannette depuis sa tendre enfance, période au cours de laquelle ils se jetaient gentiment des cailloux, pour s’amuser, en se cachant dans les vignes. Et comme dans tout conte de fée, ils se marièrent et eurent deux enfants, André et Nicole. 

Lire les autres histoires